La philosophie politique de Pierre Manent est marquée par une attention constante aux conditions concrètes d’existence des communautés politiques et par la ferme volonté d’envisager l’action politique à partir du point de vue de l’agent, c’est-à-dire de celui qui doit agir politiquement dans des situations particulières.

C’est pourquoi une grande part de la réflexion du philosophe s’est attachée, d’une part, à éclairer l’histoire des formes politiques et de leurs interactions complexes avec les régimes politiques et, d’autre part, à élaborer une véritable phénoménologie de l’action politique.

Ce travail d’élucidation philosophique ne fut jamais d’ailleurs que théorique, car il répondait à ce que l’on peut identifier comme une double urgence du politique. Urgence du politique, d’abord, au sens de l’urgence de donner une vigueur nouvelle à la question de la bonne forme politique rendant possible l’exercice du « se gouverner soi-même »; urgence du politique, ensuite, au sens de l’urgence d’établir les conditions nécessaires à une compréhension juste de l’action politique et de sa valeur dans l’espoir de mieux armer l’agent dans ses choix et actions politiques.

Cette réflexion manentienne sur l’urgence du politique ne s’est d’ailleurs jamais développée sans un va-et-vient constant avec la situation politique concrète de la France, de l’Europe et, plus globalement, des démocraties libérales. Elle tire une partie de son énergie et de sa pertinence de l’analyse en profondeur de ce que l’on peut appeler — faute d’un terme plus précis — la « crise contemporaine de la démocratie libérale ». Cette crise qui a pris une tournure spécifique en Europe, et, en particulier, en France. Bien que Pierre Manent ait été très tôt sensible à cette crise, son analyse de ses tenants et aboutissants est devenue plus pressante dans les dix dernières années. Il y a bien ici pour lui une urgence du politique au sens le plus fort du terme.

La thématique centrale de ce colloque vise donc à réfléchir à la description que le philosophe politique présente de cette crise et aux outils qu’il met en œuvre pour l’analyser. Pour arriver à une compréhension fine de la position et des propositions de P. Manent, il sera important de les ressaisir dans le mouvement global de sa pensée.

Quatre thèmes seront notamment abordés lors de ce colloque qui recoupent de larges pans de l’interrogation politique de P. Manent.

• ‍Les avatars contemporains de la question théologico-politique : religion et politique, l’Europe chrétienne?, Islam en France ou Islam de France?, liberté de conscience et liberté religieuse, l’Église catholique et le catholicisme, l’engagement politique du catholique, laïcité, christianisme et démocratie, la nouvelle « question juive » etc.

• La nation dans tous ses états : formes politiques et régimes, nations et empires, l’histoire de la nation et des nations européennes, la nation française, l’Union européenne et l’Europe des nations, libéralisme et nation, mondialisation et nation (géopolitique des nations), y a-t-il un avenir pour la nation? etc.

• ‍Le libéralisme et ses défis : la crise contemporaine du libéralisme, les critiques des droits de l’homme, l’individualisme contemporain, histoire du libéralisme, libéralisme économique et libéralisme politique, libéralisme moral et culturel, État et libéralisme etc.

• ‍La vocation du politique : « l’homme, un animal politique », les vertus du citoyen, les vertus de l’homme démocratique, qu’est-ce qu’un bon politicien?, les conditions de l’action politique, l’homme politique démocratique, les partis et les institutions politiques, rôle de la philosophie politique etc.

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Avec :

• ‍Jean-Pierre Delange, agrégé de Philosophie, EHESS‍
• Pierre Manent, directeur de recherches émérite, Centre Raymond Aron, EHESS, Paris

PROGRAMME DU COLLOQUE DU 31 MAI