Exposition

Brian Griffin / The Black Country


Première exposition parisienne de ce photographe anglais.

Peut-on aujourd'hui aborder le travail sans tomber dans des considérations purement matérielles ? Peut-on dépasser ou transcender par l'art les altercations et différents entre les niveaux sociaux qui sont impliqués dans le monde du travail ? Quel rôle le travail joue-t-il dans la vie quotidienne, sachant combien il nous façonne, nous transforme ? La spiritualité a-t-elle sa place dans le monde du travail?

Telles sont les questions soulevées par l'œuvre photographique du britannique Brian Griffin. L'homme et son humanité y occupent la place centrale, ils sont au cœur d'un parcours qui approche par de multiples biais l'invisible.

Dans The Black Country, à l’occasion de sa première exposition parisienne, Brian Griffin nous propose un ensemble d'œuvres qui révèle des hommes et femmes vivant ou ayant vécu la rudesse et la violence du travail dans une des régions les plus industrialisées d’Europe. Ces clichés nous livrent le regard personnel d'un artiste appartenant à cet univers qui a marqué son enfance et sa jeunesse. Il souhaite recréer ce monde uni autour des usines et du travail, les ouvriers comme les dirigeants, les habitants, dans le quotidien de leur vie, magnifiés par la photographie.

Invité à proposer ses œuvres au Collège des Bernardins, Brian Griffin a souhaité investir l’ancienne sacristie. L'équilibre et la dimension verticale de l'espace l'ont immédiatement attiré, tout autant que son atmosphère spirituelle.

Sans être une chapelle, la sacristie se voit ainsi saisie par un appel à porter les hommes et femmes qui subissent la rudesse du travail vers le haut, un appel à la transcendance dans ce qu'il y a de plus simple et de plus petit, de plus quotidien.

Note d'intention de l'artiste

« Cette exposition montre comment il est possible, à travers une forme d’art choisie, d’ouvrir son cœur, de se dévoiler. J’ai passé une grande partie de mon enfance dans les chapelles et les églises car j’étais enfant de chœur. C’est pourquoi les images créées pour cette exposition sont sans aucun doute imprégnées de l’iconographie chrétienne. C’est la première fois que j’ai l’opportunité de réaliser un projet aussi personnel, sur ma famille, mon enfance et sur la région où j’ai grandi dans les années 50 et 60. Le Collège des Bernardins m’a offert l’espace et les moyens d’explorer mes émotions profondes et mes inspirations qui s’enracinent dans le Black Country, où j’ai grandi, entouré des bruits et des fumées venant des usines voisines, ainsi que par les incessantes allées et venues des ouvriers.

C’est une chance formidable pour moi d’explorer ma construction intérieure, et je pense que le fait que cette exposition me soit proposée par le Collège des Bernardins en France, me permet d’aborder ce projet sur mon pays avec une émotion plus retenue. Cette exposition est pour moi une source d’émotion mais va aussi illustrer clairement les dynamiques visuelles et l’humour qui ont marqués profondément mon travail. Et l’espace d’exposition proposé par le Collège me semble parfait pour créer une atmosphère puissante, une atmosphère qui j’espère sera inoubliable et lumineuse. Je veux utiliser ce magnifique espace voûté pour tracer ce voyage dans mon passé et pour accélérer la venue de mon futur. »

Brian Griffin, à propos du projet « The Black Country ».

Le « Black Country »

« Le Black Country est une région aux contours mal définis située dans l’ensemble urbain des West Midlands, au nord et à l’ouest de Birmingham et à l’ouest et l’est de Wolverhampton. A partir de la fin du XIXe siècle, cette région est devenue l’une des plus intensément industrialisées du pays. Les mines de charbon du Sud Staffordshire, la cokéfaction du charbon ainsi que les fonderies de fer et les aciéries alimentées au charbon local produisaient un niveau de pollution de l’air quasi inégalé sur la planète.

C’est dans cette région que je suis né juste après la Seconde Guerre Mondiale, en 1948, de parents qui travaillaient dans les usines locales. Nous vivions au fond d’un cul-de- sac étroit dans une maison mitoyenne très simple, écrasée entre les usines environnantes. Il n’y avait ni salle de bain ni eau chaude, les toilettes étaient généralement dehors et les rues étaient éclairées au gaz.

Je n’ai pas parlé anglais avant l’âge de 11 ans, car nous parlions un dialecte spécifique à notre région. Les personnes âgées l’utilisent aujourd’hui encore.

Pour moi qui ai grandi dans cette région où le système éducatif est très faible et où travailler dans une usine est la carrière professionnelle normale, devenir un photographe international reconnu fut un vrai combat. »

Brian Griffin.

Brian Griffin en quelques dates...

Naissance à Birmingham. 69 : Travaille dans une usine de la British Steel Corporation fabriquant des tapis roulants près de Birmingham. Travaille à Birmingham en tant qu’ingénieur spécialisé dans le nucléaire. Devient photographe freelance après des études à l’École Polytechnique de Photographie de Manchester entre 1969 et 1972. Travaille encore 8 mois dans la sidérurgie. Réalise la photographie de couverture de l’album de Joe Jackson Look sharp ! Première exposition française aux « Rencontres d’Arles, festival international de photographie ». Nommé « Photographe de la décennie » par le quotidien The Guardian. Publie Work, ouvrage qui regroupe les photographies de son projet sur le thème du travail mené entre 1975 et 1988 sur le chantier de Broadgate à Londres. Commence à réaliser des publicités télévisées et des clips vidéo (Only when I lose myself de Depeche Mode en 1998). Écrit, photographie et dirige le court-métrage Claustrofoamia. Écrit, photographie et dirige le court-métrage The Curl. Série de portraits d’ouvriers à Stratford. Réalise un film documentaire sur Paul McCartney à la demande de celui-ci. The Art Museum de Reykjavik (Islande) présente la première rétrospective consacrée à son travail. Nommé membre honoraire par La Royal Photographic Society. The Water People, commande de Reykjavik Energy, société d’énergie géothermale, rassemblant des portraits photographiés à travers de l’eau et des paysages dépouillés d’Islande. Team, The people who built the Channel tunnel rail link, campagne de photographie des managers et des ouvriers sur le chantier du High Speed Rail 1 commandée par London & Continental Railways (LCR). Première rétrospective française aux Rencontres d’Arles.

Dernières expositions

2010 : « Face to Face », Rétrospective, Birmingham, Royaume-Uni. 2010 : « Road to 2012 », Jeux Olympiques de Londres 2012, National Portrait Gallery, Londres, Royaume-Uni.

2009 : Les Rencontres D'Arles, Arles, France.

2002 : « One man show », ArdenandAnstruther, Petworth, et England & Co. Gallery, Londres, Royaume-Uni. « No Such Thing As Society », Photography in Britain 1967 to 1987. « Between Today and Yesterday », Turnpike Gallery, Leigh, Royaume-Uni.

« Madame la Presidente », Les Rencontres d'Arles, Arles, France. « Team Photo », St. Pancras, Londres, Royaume-Uni. « The Water People », Gallery 100 degrees, Reykjavík, Islande et Café Gallery Projects, Londres, Royaume-Uni. « Influences », Reykjavík Art Museum, Hafnarhús, Islande. « The Trip », St. Pancras, Londres, Royaume-Uni. « A Question of Identity », National Portrait Gallery, Londres, Royaume-Uni. « Time Out Portraits », Tom Blau Gallery, Londres, Royaume-Uni. « Circling the Square », National Portrait Gallery, Londres, Royaume-Uni. « People and the City », Londres and Birmingham, Royaume-Uni. « Le Cheveu », L'Espace Gallery, Montreal, Canada. « Contacts », Londres, Royaume-Uni. « Collecting Photographs », The Focus Gallery, Londres, Royaume-Uni. « Seeing Things », Victoria and Albert Museum, Londres, Royaume-Uni.

Publications

Brian Griffin Copyright, autopublié, 1978 Power, Travelling Light, 1981 Y, journal autopublié, 1983 Auras, Olympus Gallery, 1983

Power, paperback, Travelling Light, 1984 Open, autopublié, 1986 Portraits, autopublié, 1987, réédition en 1988 Work, autopublié, 1989

Film Stills, autopublié, 2000 Brian Griffin Influences, autopublié, 2005 The Water People, Island, 2006 Baugur The Movie, Baugur, 2006 Teamphoto, LCR, 2007

Citations à propos de son travail :

« La photographie est entrée dans ma vie en 1966, alors que je travaillais dans une usine qui fabriquait des tapis roulant dans le Black Country, une zone près de Birmingham. Le contremaître m’a suggéré de m’inscrire au club de photo voisin. J’ignore tout a fait pourquoi il m’a parlé de ça. Pour être honnête, je n’étais pas profondément intéressé – mais je me suis inscrit au club de photo et j’ai acheté mon premier appareil. Ce n’est qu’en 1969, lorsque je travaillais dans un bureau à Birmingham en tant qu’ingénieur spécialisé dans le nucléaire que la photographie a pris une nouvelle tournure dans ma vie. [...] j’ai envoyé ma candidature à des universités pour me plonger à plein temps dans l’étude de la photographie. [...] Le Manchester College of Art and Design a été la seule université qui m’a accepté. A la fin des années 1960, la photographie n’était pas une discipline très à la mode en Angleterre. [...] J’ai eu mon diplôme en 1972. J’ai passé les huit mois suivants à travailler dans la sidérurgie afin de gagner un peu d’argent, avec l’ambition de devenir photographe professionnel à Londres.

Toutes les illusions de réussite que j’entretenais ont été mises à l’épreuve et presque brisées jusqu’au moment où, [...] j’ai rencontré Roland Schenk, le directeur artistique du magazine Management Today, qui à mon grand étonnement m’a proposé un travail sur-le- champ. [...] Je passais mon temps à photographier des gens dans des bureaux, un environnement que j’avais quitté trois ans plus tôt, en plein désespoir. C’était bien le style de photographies qui m’intéressait le moins, mais c’était ma seule chance. Il faut aussi noter qu’au début des années 1970 ce style de photographie n’était vraiment pas à la mode. Roland, suisse et artiste, m’a aidé à chercher mon inspiration, ma voie. Après deux ans de recherche, je l’ai trouvée : un mélange d’expressionisme allemand, de films noirs, de musique, de Franz Kafka et de réalisme social soviétique. Sans doute parce qu’à un niveau visuel et sonore, ces éléments me rappelaient mon enfance dans le Black Country des années 1950. J’ai commencé à voir que je les photographiais comme ceux de ma propre scène théâtrale. Le théâtre de mon imagination. Cela me ravissait d’imaginer tous ces directeurs et ces comptables comme des acteurs dans des pièces de théâtre, avec leurs bureaux en guise de décor.

C’est en 1976 que j’estime avoir pris ma première bonne photo – des travailleurs londoniens dans la City, intitulée Rush Hour London Bridge, en référence à Métropolis de Fritz Lang. Ce jour-là, j’ai enfin pu respirer : je savais que je pouvais devenir un véritable photographe. »

Brian Griffin, 28 décembre 2008.
Texte écrit à l’occasion de la rétrospective de ses photos lors des Rencontres d’Arles 2009

PARTENAIRES DE L’EXPOSITION

The New Art Gallery Walsall. Owen Family Trust. The New Art Gallery Development Trust Multistory Dudley Metropolitan Borough Council Holtite Ltd Boro Foundry Ltd Contemporary Wardrobe, London. Lighthouse Darkroom Metro Imaging, London The Flash Centre Lewis Leathers Andrew Hale The Old Swan Inn, Netherton, Dudley